Art pariétal et chauves-souris

Jeudi 31 mars 2022, de 11h15 à 12h00

Théâtre de Saint-Dizier

Art pariétal et chauves-souris : une cohabitation à revoir sous l’angle de la biocorrosion.

Depuis des millénaires, les hommes et les animaux ont fréquenté le milieu souterrain. Ainsi, les grottes sont connues pour les vestiges archéologiques qu’elles contiennent, dont des œuvres pariétales, mais aussi pour abriter des colonies de chauves-souris parfois très importantes.

Si l’on connaissait quelques traces localisées liées à la présence de chiroptères en grotte, aussi bien au plafond que sur les parois, il apparaît que cet impact avait été largement sous-évalué. En effet, ces dernières années, les recherches en karstologie ont intégré et développé cet aspect, révélant à quel point, même sous nos latitudes, l’impact de la biocorrosion est important. Ainsi, nous réalisons à peine en ce moment son ampleur : elles ont non seulement altéré la roche et les concrétions mais aussi parfois très largement refaçonnées les galeries, au point que leur section a considérablement augmenté voire doublé dans certains cas !

Évidemment, ce recul des parois a eu un impact sur les œuvres pariétales et, là où la biocorrosion a joué, les traces des artistes de la Préhistoire ont disparu. L’identification de l’impact de la biocorrosion permet donc relativiser l’absence d’œuvres dans certaines parties de cavité voire dans certaines grottes. En retour, compte tenu de la généralisation de ce phénomène, on peut aller jusqu’à se demander pourquoi reste-t-il encore des cavités ornées ? Les premiers exemples qui viennent en tête montrent qu’il s’agit à chaque fois de grottes ou de parties de grottes qui n’étaient plus accessibles aux chiroptères. C’est-à-dire qu’après le passage des artistes, une fermeture localisée ou généralisée de la cavité a bloqué l’accès aux chauves-souris, permettant la préservation de ces œuvres fragiles jusqu’à aujourd’hui.

Il est donc important désormais de revoir l’ensemble des grottes ornées afin d’évaluer en détail l’impact de la biocorrosion. Cette approche, nécessairement interdisciplinaire, regroupe des géomorphologues, des archéologues, des géochimistes mais aussi des climatologues, des éthologues et des microbiologistes. Plusieurs programmes de recherche interdisciplinaires viennent donc d’être initiés, dont les derniers résultats ne font que confirmer l’importance et l’étendue de ce phénomène. Sa prise en compte invite nécessairement à une relecture de la répartition de l’art pariétal en grotte.

Intervenant

Laurent Bruxelles